Des avancées ?

Des publications en ligne font part d’une nouvelle étude sur un nouveau traitement qui permettrait de guérir de la maladie de Parkinson : l’injection du facteur GDNF directement dans le cerveau.  Comme souvent, les journalistes qui rédigent ces textes cherchent avant tout à attirer l’attention de l’audience et vulgarisent sommairement en quelques lignes des études cliniques complexes. Le résultat est un titre très prometteur qui annonce la découverte d’un traitement miracle, mais qui malheureusement ne correspond pas ou peu à la réalité des données scientifiques.  Nous avons décidé de faire un bref compte rendu de l’étude, effectuée en Grande-Bretagne et financée en partie par l’association Parkinson UK, et des avancées qu’elle apporte pour les personnes atteintes de la maladie.

GDNF : une molécule connue depuis 1993

GDNF – ou « Glial dependent neurotrophic factor » – est un facteur très étudié. Naturellement produit par le cerveau, GDNF débute son histoire dans les années 90. GDNF est un facteur neurotrophique, c’est-à-dire une protéine qui est impliquée dans le bien-être et dans la survie des cellules. Fait intéressant, GDNF semble être tout spécifiquement important pour les cellules dopaminergiques.

Depuis 1996, de nombreuses études précliniques utilisant des modèles expérimentaux de la maladie de Parkinson (cellules, rongeurs et/ou primates) démontrent sans équivoque que GDNF a non seulement un effet neuroprotecteur, c’est-à-dire qu’il réduit la perte de cellules dopaminergiques, mais permet également la formation de nouvelles connexions dopaminergiques. Les résultats ont été répliqués et confirmés dans différents centres de recherche.

Premiers essais avec des patients atteints de la maladie de Parkinson 

GDNF ne peut être pris par voie orale. En effet, en raison de sa taille et de ses propriétés physico-chimiques, la protéine ne peut pas traverser la barrière hémato encéphalique (barrière qui entoure et protège le cerveau). GDNF doit donc être administré directement dans le cerveau pour être efficace.

Un premier essai clinique (1996), incluant des patients à un stade avancé de la maladie et évaluant l’effet de l’injection intra-ventriculaire de GDNF dans le cerveau, doit être arrêté prématurément à la suite de l’apparition de nombreux effets indésirables.

Suivront trois autres essais cliniques (2003 – 2007) évaluant l’effet de l’administration chronique et constante de GDNF dans le cerveau pendant 12 mois. Les résultats suggèrent une efficacité du traitement, mais différente pour chaque étude. Les chercheurs montrent que le traitement peut induire :

  • Une amélioration durable des symptômes moteurs et une amélioration de la qualité de vie.
  • Une amélioration au niveau de l’imagerie cérébrale, mais aucune amélioration clinique
  • Le troisième essai doit être arrêté à la suite de l’apparition d’anticorps anti-GDNF dans le sang ce qui représente une contre-indication au traitement.

Il est donc difficile d’affirmer que ce type de traitement soit vraiment efficace pour ralentir la progression de la maladie.

2012 : un nouvel essai ambitieux

Sous l’impulsion de Tom Isaacs, patient atteint de la maladie de Parkinson diagnostiqué   à l’âge de 27 ans et co-fondateur de la fondation Cure Parkinson Trust, l‘association Parkinson UK (l’équivalent britannique de l’association France Parkinson) lance un essai clinique novateur pour apporter une réponse quant à l’efficacité de GDNF pour le traitement de la maladie de Parkinson.

Nourrie des échecs et des données des précédents essais, cette nouvelle étude est dotée d’un système d’injection novateur, spécialement développé pour l’étude. Le système permet l’administration lente de GDNF directement dans le cerveau au moyen de 4 cathéters (deux pour chaque hémisphère cérébral) qui sont reliés à un port situé au-dessus de l’oreille pouvant être connecté à une pompe. Les cathéters sont implantés avec une précision micrométrique grâce à une assistance robotique durant l’intervention chirurgicale.

Quarante-et-un (41) patients ont participé à l’étude randomisée en double aveugle, contre placebo. La moitié des patients ont reçu le traitement – GDNF- et l’autre moitié un placebo – liquide physiologique sans aucune activité biologique. Le traitement a duré 40 semaines et les patients ont reçu une injection lente toutes les 4 semaines.

Résultats encourageants, mais mitigés

Les patients ayant reçu le traitement avec GDNF présentaient tous une amélioration des symptômes moteurs à la fin des 40 premières semaines. Une amélioration similaire était toutefois aussi mesurée chez les patients recevant le traitement placebo.

Les résultats de l’imagerie cérébrale (PET scan avec le radioligand 18F-DOPA), effectuée avant le début et après 40 semaines de traitement, montrent une augmentation du signal chez le patient recevant le GDNF. Ceci n’est pas le cas pour le traitement placebo. Cette augmentation de signal peut indiquer que chez les patients traiter avec GDNF :

  • Il y a plus de dopamine dans les terminaisons neuronales encore présentes
  • Il y a plus de terminaisons dopaminergiques
  • Il y a plus de cellules, différentes des cellules dopaminergiques, qui peuvent absorber le radioligand

Cette différence entre les deux groupes suggère que le traitement a un effet sur des cellules normalement en souffrance dans la maladie.

À la fin du traitement, tous les patients ont eu le choix de poursuivre le traitement pendant 40 semaines supplémentaires. Tous ont choisi de continuer et ont, à ce stade de l’étude, tous ont reçu des injections contenant le GDNF !

Au terme des 80 semaines, tous les patients présentaient une amélioration, modérée ou importante, des symptômes moteurs et exprimaient une amélioration de leur qualité de vie.

Un espoir pour le futur

Les résultats de cette étude ne permettent pas d’affirmer que le traitement avec GDNF est efficace et ne sont pas sans équivoque, mais ils apportent de nouvelles connaissances concrètes pour le futur.

Il est en premier lieu important de noter que, pour cet essai, seul un patient a du abandonné l’étude . Des effets indésirables sont bien apparus au cours de l’étude; notamment un effet indésirable majeur lié au détachement du port situé au-dessus de l’oreille  a contraint un patient à se retirer de l’essai.   Malgré l’ampleur de l’intervention chirurgicale et du protocole de suivi, malgré les effets indésirables 41 sur 42 patients sont tous allés jusqu’au bout des 80 semaines de traitement et d’évaluation.

L’apparition d’anticorps anti-GDNF, détectée dans des études précédentes, n’a jamais été mesurée chez les patients, même après 80 semaines. Ceci indique que le traitement est bien supporté et ne stimule pas le système immunitaire.

Cet essai permet de démontrer que l’injection lente et contrôlée de GDNF directement dans le cerveau grâce à un système novateur est possible et bien tolérée par les patients à long terme. Cette technologie qui a fait ses preuves durant l’étude GDNF est déjà utilisée dans d’autres essais cliniques.

Tous les partenaires impliqués, chercheurs, patients et associations, continuent à travailler main dans la main pour tirer les leçons et apprendre de cette étude. Cette étroite collaboration de tous les acteurs est nécessaire et fondamentale dans le but d’améliorer les chances de réussite des études à venir.

Deux publications scientifiques décrivant les résultats de cette étude peuvent être obtenues en suivant les liens suivants:

Whone et al (2019) Brain 142:512-525

Whone et al (2019) J Parkinsons Dis.  doi: 10.3233/JPD-191576

La chaîne de télévision anglaise BBC a suivi certains des patients inclus dans cette étude. Deux documentaires en anglais et d’une durée de 1 heure qui relatent leur parcours durant toute la durée de l’essai clinique ont été produits et peuvent être visionnés en suivant les liens ci-dessous. ATTENTION, ces témoignages sont émouvants, poignants et déchirants. Certaines images sont fortes peuvent affectés un public sensible

GDNF: un traitement miracle? Episode 1

GDNF: un traitement miracle? Episode 2

Image Domaine public: Whone et al. (2019) Brain 142:512-525

 

 

 

 

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