La radio-chirurgie
La radiochirurgie par Gamma Knife est un des outils de l’arsenal thérapeutique qui peut être effectif pour le traitement du tremblement, essentiel ou du Parkinson (Higuchi et al, 2016 ; Witjas et al, 2016).
Le tableau clinique de la maladie de Parkinson repose en grande partie sur la présence de quatre signes cardinaux : le tremblement de repos, la bradykinésie/akinésie, la rigidité et l’instabilité posturale, qui peuvent être associés, ou non, à d’autres symptômes. Les symptômes ne s’expriment pas avec la même intensité chez tous les patients et tous les patients ne présentent pas l’intégralité des signes.
Le tremblement d’un membre (main, pied, jambe) est le signe le plus connu de la maladie de Parkinson, mais il n’est présent que dans environ 2/3 des cas. Le tremblement se manifeste lorsque le membre atteint est au repos et diminue lors de mouvements volontaires. Les situations stressantes peuvent accroître le tremblement.
Certaines formes de la maladie de Parkinson sont extrêmement tremblantes et peuvent être épuisantes pour les personnes qui en souffrent. Ces tremblements peuvent être soulagés par de fortes doses de traitement dopaminergique ; celles-ci ne sont toutefois pas toujours tolérées et peuvent provoquer des effets indésirables invalidants tels que des hallucinations, des troubles cognitifs, ou des problèmes digestifs.
Qu’est-ce que la radiochirurgie par Gamma Knife ?
La radiochirurgie par Gamma Knife est une technique qui utilise de multiples faisceaux convergents étroits afin de délivrer une dose unique de photons* (rayons gamma) sur une cible localisée dans le cerveau avec une précision stéréotaxique §. Le rayonnement gamma est issu de près de 200 sources de cobalt et permet de provoquer une lésion au point de convergence des rayons, sans dommage au structure adjacente et sans dommage le long du trajet des rayons.
* Les photons sont des particules de la lumière qui contiennent une grande énergie.
§ Stéréotaxie signifie « ordonnance dans l’espace ». La stéréotaxie permet de repérer et/ou atteindre une cible dans le cerveau à partir de la connaissance d’une carte tridimensionnelle préétablie.
A qui est proposée la radiochirurgie par Gamma Knife ?
Les thérapies médicamenteuses sont la première ligne de traitements pour les mouvements anormaux involontaires comme les tremblements. Cependant, dans certains cas, ces traitements médicamenteux sont inefficaces ou doivent être interrompus suite à des effets secondaires indésirables, et des alternatives thérapeutiques doivent être trouvées. La chirurgie lésionnelle, qui permet de supprimer certaines connexions et bloquer les structures hyperactives dans le cerveau responsables des mouvements anormaux, a été utilisée par le passé pour traiter les tremblements. Cette chirurgie est toutefois irréversible. La découverte de la stimulation cérébrale profonde (SCP) à la fin des années 80 et qui a l’avantage d’être une technique réversible, adaptable pour chaque patient et qui peut être effectué de façon bilatérale, a supplanté progressivement les techniques lésionnelles.
Toutefois, certaines personnes présentent des contre-indications à la Stimulation Cérébrale Profonde, comme par exemple un âge avancé, un diabète sévère, une insuffisance cardiaque ou respiratoire, voire la prise d’un traitement anticoagulant. Dans ces cas où la Stimulation Cérébrale Profonde n’est pas envisageable, la radiochirurgie par Gamma Knife représente aujourd’hui une alternative thérapeutique possible.
En quoi consiste le traitement par Gamma Knife ?
La radiochirurgie par Gamma Knife a été développée par un neurochirurgien suédois (Lars Leksell) et permet d’opérer sans ouverture de la boite crânienne. Il s’agit donc d’une stratégie non-invasive.
Pour le traitement des tremblements, la cible préconisée aujourd’hui est le noyau ventral intermédiaire du thalamus (VIM). Le ciblage de cette petite structure cérébrale profonde est possible grâce au développement technologique des méthodes d’imageries avancées. Le patient doit passer une IRM (Imagerie par Résonnance Magnétique) cérébrale et une tomographie informatisée qui permettent d’obtenir une cartographie en trois dimensions du cerveau et de déterminer les coordonnées de la cible, le VIM. Le patient est ensuite installé dans un appareil, le Gamma Unit, pendant soixante à quatre-vingt-dix minutes. La convergence d’environ 200 sources de rayon gamma de relative basse intensité permet de localiser une grande énergie en un seul point, en l’occurrence le VIM, et permet de faire une lésion de 3 à 4 mm de diamètre, en évitant des dommages sur les tracés des rayons qui possède une énergie individuelle réduite.
Avantages et désavantages de la radiochirurgie par Gamma Knife
Avantages
La radiochirurgie par Gamma Knife peut être une alternative pour les personnes atteintes de tremblement essentiel ou de Parkinson très invalidants et qui présentent des contre-indications à la SCP.
L’avantage principal du Gamma Knife est une très nette diminution des risques liés à la procédure puisqu’il n’y a pas de craniotomie (ouverture du crâne), donc pas de risques infectieux ou hémorragiques dus à l’introduction de matériel. La procédure est rapide et généralement effectuée sous anesthésie locale.
Un autre avantage est lié à la réduction importante des coûts directs et indirects : l’hospitalisation est beaucoup plus courte : 48 à 72 heures pour le Gamma Knife comparé à quinze jours à trois semaines pour une SCP ; le suivi est léger avec une consultation à trois mois et six mois, puis une hospitalisation courte à un an pour faire le bilan.
Désavantages
Un des désavantages principaux de la radiochirurgie par Gamma Knife est que, contrairement à la Stimulation Cérébrale Profonde, la lésion induite est irréversible. Tout effet secondaire causé par la procédure pourrait donc être également irréversible.
La radiochirurgie n’a pas la même précision comparée à celle obtenue lors de la procédure pour la Stimulation Cérébrale Profonde. Ceci est lié au fait que la zone cérébrale qui doit être exposée aux radiations n’est pas visible durant la procédure et ne peut être confirmée par une évaluation neurophysiologique intra-opératoire. Il n’est donc pas possible de certifier à 100 % la précision des rayons durant la procédure. Le développement d’instruments IRM toujours plus performants et puissants a toutefois permis de diminuer considérablement les risques d’imprécisions.
L’effet du Gamma Knife est progressif ; la lésion ne se développe que plusieurs mois après l’intervention et est très variable selon les patients. De même, la diminution des tremblements, qui est corrélée à la lésion, n’est pas détectable immédiatement après la procédure, mais apparait également progressivement avec le temps. Le suivi se fait tous les trois mois par un contrôle IRM (Imagerie par Résonnance Magnétique) qui permet de vérifier l’apparition de la lésion. Il arrive que le Gamma Knife soit inopérant ; environ 20 % des patients sont résistants au rayon et ne développent aucune lésion, et ceci bien que la dose de rayons appliquée soit standardisée. Cette résistance ne peut malheureusement pas être connue à priori.
Les risques de complications sont limités mais certains patients peuvent développer un œdème induit par la lésion ; si cet œdème touche la capsule interne, une perte d’une partie de la motricité (parésie) du bras, en général transitoire, peut être observée.
Les contre-indications à la radiochirurgie par Gamma Knife s’adressent principalement aux personnes qui ne peuvent passer d’IRM (Imagerie par Résonnance Magnétique), comme par exemple les porteurs de pacemaker.
Essais cliniques
Différentes études cliniques montrent que la radiochirurgie peut réduire les tremblements et donc améliorer les gestes de la vie quotidienne tels que l’écriture, la capacité de tenir un verre d’eau et boire/manger chez les personnes atteintes de maladie de Parkinson avec tremblements invalidants. Les résultats semblent indiquer qu’il n’y a pas de dégradation cognitive et font état d’une amélioration dans les activités de la vie quotidienne.
Une étude française récente effectuée avec 50 patients souffrant de tremblements, essentiel ou de Parkinson, montrent que les tremblements sont réduits dans 54% et que la qualité de la vie est améliorée de manière significative pour 72% des patients (Witjas et al, 2015).
Une autre cible du Gamma Knife envisagée actuellement est le noyau subthalamique ; des études de faisabilité sont en cours pour des patients pouvant répondre aux critères de la Stimulation Cérébrale Profonde mais qui ont des contre-indications (eg. atrophie cérébrale ne permettant pas l’implantation d’électrodes, traitement anticoagulant,…)
Conclusions
La radiochirurgie par Gamma Knife peut être une alternative thérapeutique pour des patients atteints de la maladie de Parkinson à forme très tremblante ayant des contre-indications à la Stimulation Cérébrale Profonde, et pour qui le contrôle des tremblements au travers de thérapies médicamenteuses ne fonctionne pas ou plus.
La radiochirurgie par Gamma Knife est irréversible ; les patients doivent être clairement informés des risques liés à la procédure et doivent être étroitement suivis durant la période postopératoire afin de limiter au maximum les complications. Les résultats des études cliniques sont encourageants et des études sont encore nécessaires pour déterminer les effets à long terme, l’efficacité et les effets secondaires de la procédure.