Les vaccins alpha-synucléine

Les vaccins alpha-synucléine– Le développement d’un vaccin pour ralentir la progression de la maladie de Parkinson ?

La maladie de Parkinson fait partie du groupe de pathologies définies comme « synucléopathies » qui sont caractérisées par la présence d’agrégats anormaux de protéines au sein des cellules nerveuses : les « corps de Lewy ». Un des composants principaux des corps de Lewy est la protéine alpha-synucléine.

Qu’est-ce que l’alpha-synucléine ?

L’alpha-synucléine est une protéine très abondante dans l’organisme et en particulier dans le cerveau. Sa fonction n’est pas bien connue mais la protéine semble, entre autre, jouer un rôle dans la transmission des signaux dans le cerveau ainsi que dans la régulation des niveaux de dopamine.

L’importance de la protéine alpha-synucléine dans la pathologie de la maladie de Parkinson est connue depuis plusieurs décennies. Une mutation de l’alpha synucleine, décrite en 1997, a été la première forme génétique associée avec la maladie de Parkinson. Aujourd’hui de nombreuses évidences génétiques indiquent que l’alpha-synucléine joue un rôle important dans la maladie de Parkinson. Des mutations de la protéine observées dans des formes familiales de la maladie peuvent conduire à une augmentation des niveaux d’alpha-synucléine ou à la formation de formes toxiques qui contribuent à la pathologie.

Limiter ou arrêter la propagation de l’alpha-synucléine dans le cerveau

L’alpha-synucléine se trouve en temps normal sous forme soluble. Toutefois dans des conditions pathologiques, elle peut prendre des formes anormales (toxiques), et devenir insoluble formant ainsi des agrégats. Des études récentes ont suggéré que les formes toxiques de l’alpha-synucléine peuvent se propager de cellules en cellules contribuant ainsi au processus de mort cellulaire progressif qui caractérise la maladie Parkinson. Les mécanismes de propagation de la protéine ne sont pas encore complètement expliqués ; il est toutefois supposé que réduire ou bloquer la transmission des formes toxiques de l’alpha-synucléine pourrait permettre d’enrayer le processus dégénératif et ralentir la progression de la maladie. Cette hypothèse a conduit les chercheurs à développer des thérapies immunologiques (immunothérapies) dont l’action serait de réduire la propagation de l’alpha-synucléine.

Notre système immunitaire est le système de surveillance de notre corps qui nous permet de combattre les infections et/ou d’éliminer des agents pathogènes externes. Pour cela il doit avant tout être capable de reconnaitre ou détecter la présence d’une altération dans l’organisme. L’immunothérapie a donc pour but de renforcer les ressources du système immunitaire des patients (immunothérapie active) ou au contraire d’utiliser des réactifs externes pour mobiliser le système immunitaire (immunothérapie passive) et ainsi provoquer l’élimination de la forme toxique de l’alpha-synucléine.

Il faut noter que l’on ne parle pas dans le cas de l’alpha-synucléine de vaccins préventifs que l’on connait bien, tel que les vaccins antigrippaux, dont l’action est d’empêcher le développement d’une maladie mais de vaccination thérapeutique qui consiste à agir sur la maladie déjà en cours en réduisant la quantité de protéine toxique.

Immunothérapie passive

L’immunothérapie passive consiste à administrer aux patients des anticorps artificiels produits en laboratoire. Ces anticorps ont pour but de reconnaitre et de s’attacher à l’alpha-synucléine et d’en favoriser ainsi l’élimination par l’organisme. Un essai clinique de phase I a été effectué en 2014-2015 sur des volontaires sains pour évaluer l’émergence d’effets indésirables liés à l’infusion intraveineuse d’un anticorps. Les premières données de l’étude, qui a inclus 40 volontaires sains recevant le traitement (l’anticorps PRX002) ou un placebo, indiquent que l’infusion de l’anticorps ne provoque pas d’effets secondaires majeurs et semble bien être toléré. Un nouvel essai clinique de phase I, en double aveugle [1], randomisé et contrôlé par placebo, incluant des patients parkinsoniens est actuellement en cours en 2016 et donnera des indications sur la tolérance à une telle immunisation chez des patients parkinsoniens.

Immunothérapie active

Dans la plupart des cas, notre système immunitaire est capable d’éliminer les intrus, les protéines anormales dans notre corps. Malheureusement, il arrive que les anomalies soient trop subtiles ou furtives pour être repérées. L’immunothérapie active vise donc à améliorer le système immunitaire afin qu’il puisse détecter ces anomalies et produire des anticorps qui permettront de les éliminer. Une première étude en ouvert [2] évaluant l’effet d’une unique infusion sous-cutanée d’un peptide [3] qui ressemble à l’alpha-synucléine (PD01A), a été effectuée avec des patients parkinsoniens. Les données obtenues indiquent que cette procédure est bien tolérée et permet la production d’anticorps reconnaissant l’alpha-synucleine détectable dans le sang de la majorité des personnes traitées. Un suivi à long terme ainsi qu’une étude évaluant l’effet d’une deuxième et troisième vaccination de rappel sont en cours Un deuxième peptide (PD03A) est également en cours d’évaluation, dans une étude en aveugle contre placebo, avec des patients parkinsoniens à un stade précoce de la maladie.

Le vaccin thérapeutique : une piste prometteuse ?

Les recherches effectuées sur les modèles animaux nous indiquent que l’immunothérapie passive et active peuvent ralentir le processus de mort cellulaire qui caractérise la maladie de Parkinson et améliorer les symptômes moteurs.

Les premières études chez l’homme suggèrent que ce genre d’immunothérapie ne provoque pas d’effets indésirables majeurs et conduit à la présence, dans le sang, d’anticorps qui reconnaissent l’alpha-synucléine. Des données à plus long terme sont à présent nécessaires afin d’évaluer les effets de cette stratégie thérapeutique sur la forme toxique de l’alpha-synucléine et de déterminer si un tel vaccin peut avoir un effet neuroprotecteur qui permettrait de ralentir la progression de la maladie.

[1] Une « étude en double aveugle » est une étude dans laquelle ni l’investigateur ni le patient connaissent le traitement.

[2] Une « étude en ouvert » est une étude dans laquelle l’investigateur et le patient connaissent le traitement.

[3] Un « peptide » est un tout petit morceau de protéine.