Éducation thérapeutique du patient (ETP)

L’éducation thérapeutique du patient – Apprendre à gérer sa vie avec la maladie

Le Pr Defebvre et son équipe nous présentent les programmes d’éducation thérapeutique et les spécificités d’EduPark proposés aux personnes atteintes par la maladie de Parkinson dans le NordPas-de-Calais. Instaurant une nouvelle relation entre le patient et les soignants, ces dispositifs permettent au malade d’être le plus autonome possible de maintenir ou d’améliorer une qualité de vie la plus acceptable pour lui.

L’annonce du diagnostic de la maladie de Parkinson marque une rupture franche dans la vie de la personne atteinte et de sa famille. Il y a « l’avant » et « l’après ». Le malade va devoir accepter une prise en charge. Il recevra des traitements qui modifient son quotidien et sur lesquels les informations obtenues sont parfois contradictoires selon les contacts établis (médicaux ou non). Aussi, en devenant patient, il devra rapidement avoir un rôle actif dans son parcours de soins et développer son propre savoir du vécu de la maladie, des effets de ses traitements et de ce qui améliore son quotidien. C’est l’objet de l’éducation thérapeutique du patient (ETP) : permettre aux malades d’acquérir des compétences pour entretenir et/ou développer leur capital santé. Pour le patient, le but consiste à se donner les moyens de gérer au mieux sa vie avec la maladie. Parallèlement, les soignants ont dû modifier leurs attitudes et apprendre à transférer leurs savoirs scientifiques. Il leur faut désormais établir une relation de partenariat de confiance avec le patient, une véritable alliance. Pour eux, l’ETP est un partage d’expériences avec les patients où chacun a autant à apprendre qu’à enseigner et où chacun s’enrichit de l’expérience de l’autre.

Une démarche de partenariat entre le malade et les soignants

La reconnaissance de l’éducation du patient comme un droit a été prévue par la loi Hôpital, patient, santé, territoire (HPST) de 2009. L’ETP doit être accessible à tous (ou au plus grand nombre). Elle est complémentaire de la prise en charge médicale classique et doit être réalisée en équipe pluridisciplinaire formée pour cela. Le patient et le soignant s’engagent réciproquement dans cette démarche. L’éducation peut se réaliser à l’hôpital mais également en ville avec les professionnels de proximité. La mise en place de ces programmes ne doit en aucun cas remplacer les actions éducatives du quotidien. La première prise de contact est un entretien appelé « bilan éducatif ».

Il met en lumière les besoins du malade et permet de proposer des ateliers éducatifs. Les aidants peuvent participer si le malade le souhaite. Les ateliers de groupe, ou individuels, favorisent l’expression du vécu de la personne et lui permettent de développer des savoirs ou des compétences. Pour avoir toutes les chances d’être efficace, le parcours doit être proposé au bon moment et être adapté aux besoins en prenant en compte tous les domaines de la vie. Cette approche requiert souplesse et travail collaboratif avec l’ensemble des acteurs sanitaires et sociaux. C’est dire combien il est essentiel de décloisonner la ville et l’hôpital dans le but de fluidifier le parcours du patient et de favoriser l’intégration du programme d’éducation. Enfin, l’ensemble de la démarche doit être évalué pour être amélioré. Ainsi, les agences régionales de santé (ARS) et la Haute autorité de santé (HAS) sont parties prenantes de ces actions.

L’éducation thérapeutique du patient (ETP) peut être proposée dès l’annonce du diagnostic ou à tout autre moment de l’évolution de la maladie en fonction des besoins de la personne malade.

Il s’agit d’acquérir :

  • Un savoir théorique : connaissances et compréhension de la maladie et de son traitement
  • Un savoir-faire pratique : activité physique, auto-surveillance des effets positifs et secondaires des traitements, éducation des proches et des aidants
  • Un savoir réagir : stress intense, activité physique inopinée, connaissance des situations où risque de off, gérer les fluctuations motrices
  • Un savoir être : acceptation progressive permettant d’élaborer une image de soi différente « avec la maladie », de préserver son capital santé, et d’envisager l’avenir avec plus de confiance.

France Parkinson et l’éducation thérapeutique du patient

L’association est fortement engagée dans l’élaboration et l’accompagnement des programmes d’éducation thérapeutique du patient (ETP). Fidèle à sa mission, elle veille à ce qu’ils se généralisent sur l’ensemble du territoire.

L’éducation thérapeutique du patient est au cœur des combats de France Parkinson. Inscrite dans le Livre blanc élaboré à la suite des États généraux d’avril 2009, une meilleure connaissance de la maladie par les malades eux-mêmes fait partie des priorités de l’association. Les initiatives de France Parkinson se sont multipliées pour soutenir l’émergence de programmes d’éducation thérapeutique Parkinson. Lors de leur mise place en 2012, les centres experts Parkinson en font une priorité et, bien naturellement, l’expertise de France Parkinson est demandée. C’est ainsi que l’association se mobilise pour construire un programme type : InteractivPark mis à la disposition de toutes les équipes de soignants. Ces équipes de professionnels de santé au sein des centres hospitaliers ou d’autres structures soumettent leurs projets de programmes d’ETP. Les programmes sélectionnés peuvent alors être financés par les agences régionales de santé (ARS)1.

En 2014, une nouvelle étape est franchie avec le Plan maladies neurodégénératives (PMND). La ténacité des associations de malades pour faire partie des groupes de travail au sein notamment du ministère des Affaires sociales et de la Santé, et y défendre la parole des malades, permet, entre autres, de faire de l’ETP une mesure phare du Plan. L’objectif étant de faciliter la gestion des maladies chroniques dégénératives par les malades. France Parkinson promeut la réalisation de programmes collectifs, reconnaissant toute l’importance de l’émulation de groupe et la valeur des rencontres.

À la demande des ARS, qui bénéficient de budgets pour financer les programmes d’ETP, les équipes de soignants sollicitent l’association pour contribuer à l’élaboration de ces programmes. Aujourd’hui, France Parkinson intervient en amont auprès des soignants qui le désirent pour relire ou co-concevoir des projets d’éducation thérapeutique, proposer des solutions, appuyer leurs propositions auprès des agences régionales de santé et soutenir les patients experts/ressources intervenants.

Mais il faut aller plus loin et il apparaît rapidement qu’il est indispensable d’impliquer des patients aux côtés des professionnels lors des différents temps d’échanges. Seuls les malades peuvent comprendre et communiquer avec justesse à partir de leur vécu. France Parkinson met alors au point un programme de formation de « patients experts » ou « patients ressources intervenants » (lire le témoignage de Valérie en p.12). Il s’agit d’intégrer dans les programmes d’ETP des personnes atteintes par la maladie de Parkinson qui grâce, à leur propre expérience, peuvent agir au même titre que les autres « éducateurs » au sein des équipes.

Le combat ne fait donc que commencer et France Parkinson reste vigilante pour qu’il y ait plus de patients experts formés intégrés dans les programmes et que les équipes éducatives les impliquent davantage.

Les centres experts Parkinson ne sont pas les seuls à s’être emparés de l’ETP: les centres de rééducation, les services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) intègrent également des programmes… Là encore les propositions sont diverses et liées aux équipes en place dans ces structures.

Aujourd’hui l’ETP n’est pas proposée sur tout le territoire, loin de là ! La plupart des centres experts Parkinson disposent de programmes mais la diversité est de mise : les propositions varient sur le contenu et sur le format (choix des ateliers, durée du programme…) et également selon les moyens disponibles et selon le public (fatigabilité, difficultés à se déplacer…). Pour l’instant, il n’existe aucun recensement sur tout ce qui se fait en France. Il ne faut pas hésiter à demander et insister auprès du neurologue : si certaines équipes ont du mal à répondre à la demande, d’autres sont en mal de candidats.

  1. Les agences régionales de santé sont des établissements publics, autonomes moralement et financièrement, placés sous la tutelle du ministère des Affaires sociales et de la Santé. Elles coordonnent les activités et attribuent le budget de fonctionnement des hôpitaux, cliniques, centres de soins ainsi que des structures pour personnes âgées, handicapées et dépendantes au plan régional, et sont l’interlocuteur unique de tous les acteurs de santé en région.

Patients experts

France Parkinson, avec le soutien de la Direction générale de la santé, a mis en place, début 2015, Interactiv Park formation, un programme destiné à aider les équipes éducatives des programmes d’éducation thérapeutique du patient Parkinson à identifier des malades pour intervenir à leurs côtés et à les former.

Cette formation de 40 heures a permis aux personnes malades d’intervenir dans le programme d’ETP aux côtés des professionnels pour être une « voix de patient à patient ».

Échange de malade à malade

Deux témoignages mettent en lumière l’importance de la parole et du partage d’expériences.

Valérie, « une patiente experte ? », la réponse claque : « Non, un patient référent ! ». Valérie réagit immédiatement. « Le terme d’expert n’est pas adapté. Nous n’avons pas envie d’être des professionnels de notre maladie. Avant tout, nous la subissons. »

Valérie a été sollicitée dès 2015 par le Dr Brefel-Courbon (CHU-Purpan de Toulouse) pour intervenir et témoigner auprès de personnes atteintes par la maladie de Parkinson dans le cadre d’Etpark, programme d’éducation thérapeutique. Elle a donc rejoint la formation de France Parkinson armée déjà d’une première expérience. « Cette formation structurante m’a intéressée car elle restitue l’histoire de l’ETP. »

Depuis, Valérie intervient régulièrement auprès de petits groupes de malades regroupés en ateliers : « Il y a d’abord un exposé sur la maladie. Mon rôle est plus d’intervenir sur les médicaments. Nous échangeons sur les trucs et astuces à propos du traitement et de sa bonne observance. Ses effets ne sont évidemment pas oubliés. » En plus de l’aide apportée à d’autres personnes en quête d’informations et de partage d’expériences, Valérie trouve un autre intérêt à son rôle: « Cela améliore la communication au sein des équipes soignantes : les rapports sont facilités.

Mais, surtout, je me rends compte que, pour les participants, quelle que soit l’ancienneté de leur diagnostic, le fait d’être en contact avec quelqu’un vivant la même maladie est rassurant. Ce que je dis est l’expression de mon vécu. Par exemple, une personne qui doit augmenter son dosage suivant la prescription de son neurologue aura moins de crainte si je lui fais part de mon expérience positive dans la même situation. Ces liens de confiance sont essentiels ».

Diagnostiqué il y a trois ans, Jean a aujourd’hui 66 ans. Actif et soucieux de comprendre ce qui lui arrive, il participe aux conférences lors de la journée mondiale Parkinson et entend des témoignages sur l’éducation thérapeutique. Il n’hésite pas à en parler à son neurologue qui l’invite à la journée organisée au CHU de Grenoble. Un groupe de quinze personnes (patients et accompagnants) est réuni ce jour-là pour en apprendre un peu plus sur la maladie, les traitements, les activités physiques…

« C’est l’occasion de poser les questions que l’on n’a pas su (ou pas eu le temps de) poser à son neurologue. La présence d’une équipe multidisciplinaire, de patients référents, de membres de France Parkinson permet de se sentir soutenu et donne des clés sur la manière de vivre mieux au quotidien. Ce partage d’expériences est très enrichissant… Nous avons pu aborder tous les sujets. Cela vaut le coup ! Un seul bémol : que cela se déroule sur une seule journée. Quel dommage ! »